Ce que disent les légendes humaines :

Avant toute chose, il faut savoir que l’Ankou est l’ouvrier de la mort (oberour ar maro en breton). Le dernier mort de l’année, dans chaque paroisse, devient l’Ankou de cette paroisse pour l’année suivante.

On dépeint l'Ankou, tantôt comme un homme très grand et très maigre, les cheveux longs et blancs, la figure ombragée d’un large feutre ; tantôt sous la forme d’un squelette drapé d’un linceul, et dont la tête vire sans cesse au haut de la colonne vertébrale, ainsi qu’une girouette autour de sa tige de fer afin qu’il puisse embrasser d’un seul coup d’œil toute la région qu’il a mission de parcourir.

Dans l’un et l’autre cas, il tient à la main une faux. Celle-ci diffère des faux ordinaires en ce qu’elle a le tranchant tourné en dehors. Aussi l’Ankou ne le ramène-t-il pas a lui, quand il fauche ; contrairement à ce que font les faucheurs de foin et les moissonneurs de blé, il la lance en avant.

Le char de l’Ankou (karrik ou karriguel ann Ankou en breton) est fait à peu près comme les charrettes dans lesquelles on transportait autrefois les morts. Il est traîné d’ordinaire par deux chevaux attelés en flèche. Celui de devant est maigre, efflanqué, se tient à peine sur ses jambes. Celui du limon est gras, a le poil luisant, et franc du collier.

L’Ankou se tient debout dans la charrette.

Il est escorté de deux compagnons, qui tous deux cheminent à pied. L’un conduit par la bride le cheval de tête. L’autre a pour fonction d’ouvrir les barrières des champs ou des cours et les portes des maisons. C’est lui aussi qui empile dans la charrette les morts que l’Ankou a fauchés.

 

Ce que dit l'Histoire Invisible sur le Royaume de l'Ankou :

DATE DE CREATION
Probablement dans les premiers siècles de l'ère chrétienne. La dernière édition du Livre des Royaumes, compilée par l'Arcane au XIIIème siècle, en fait déjà mention. Il serait intéressant de savoir Si c'était le cas des éditions précédentes...

Elles ont malheureusement disparu au cours des convulsions politico-mystiques de ces cinq derniers siècles. Quoiqu'il en soit, l'Ankou ou une figure qui y ressemble apparaît très tôt dans les légendes bre-tonnes…

 

SURFACE
Toute la Bretagne à l'Ouest d'une ligne Rennes/Nantes est sous l'ombre du Royaume. C'est l'un des plus étendus d'Europe Occidentale, et son souverain est considéré par tout le monde comme une puissance à ménager.

Toutefois, il est important de se souvenir que ce n'est pas le seul Royaume de la région.

Un autre Selenim règne sur Brest, un Royaume important est centré sur le golfe du Morbihan et il en existe sans doute plusieurs autres qui nous sont inconnus. En revanche, c'est de très loin le plus ancien et le plus influent.

 

ACCES
Plusieurs accès permanents se trouvent dans les Monts d'Arrée, notamment autour du Yeun Ellez. L'un d'eux s'ouvre dans le cimetière du village de la Feuillée, un autre débouche devant un vieux chêne que les gens du pays appellent "l'Arbre aux Pendus", un troisième entre les mégalithes de la "Noce de Pierre", un groupe de menhirs qui se dresse sur les rives du lac, à l'opposé de la centrale désaffectée... En vision-ka Selenim, ils apparaissent comme des "torsions" de l'espace - un chemin qui serpente entre les tombes là où, en vision normale, il n'y a qu'un mur, ce genre de choses... En vision-ka Nephilim, il n'y a bien entendu rien à voir. Par ailleurs, toutes les paroisses de Bretagne ont une porte vers le domaine de l'Ankou. Il les ouvre et les ferme à volonté, au gré de ses caprices et de ses voyages. Elles sont situées souvent au carrefour de deux routes, ou dans les cimetières.

 

PAVANE
Elle change très peu aux abords des accès. Tout au plus entend-on d'imperceptibles cliquetis d'ossements, mêlés aux accords habituels. A l'intérieur, le silence règne en maître, à part la plaine monotone et permanente du vent. Toutefois, de temps à autre, on entend des bribes de musique ou des gémissements, plus le murmure de la mer en contrepoint dans les régions côtières.

 

DESCRIPTION DU ROYAUME
Au fil du temps, l'Ankou s'est crée une Bretagne qui ressemble énormément à celle des humains.

Simplement, il y fait gris et venteux en permanence, et les journées n'y durent jamais plus de six heures (subjectives ! Dans ce Royaume comme dans tous les autres, le Temps n'est pas le tyran rigide auquel les résidents de la Terre sont habitués). Pour résumer grossièrement, on pourrait dire que le domaine de l'Ankou est essentiellement une lande interminable, balayée par un vent glacial. Les rares collines ne fournissent aucun abri contre ce vent qui, selon la légende, débarrasse les morts de leur chair pour en faire des squelettes... De loin en loin se dresse un arbre rabougri, aux formes torturées Il porte souvent quelques pendus, et abrite souvent une douzaine de corbeaux.

A l'exception des âmes humaines, les principaux résidents du lieu sont les corbeaux et les chiens, sans oublier les énormes mouettes noires qui vivent au bord de l'océan.

Ceci dit, cette première impression d'uniformité est vite démentie si le voyageur se risque a parcourir quelques kilomètres. Presque tous les sites importants de la Bretagne médiévale ont leur double ici, même si c'est une copie pervertie et déformée. Il existe une immense forêt sombre à l'emplacement de Brocéliande, par exemple.

Mais les arbres y sont noirs, et elle est hantée par des loups et d'autres choses qu'il ne fait pas bon de déranger.

Il n'existe pas de grosse agglomération. En revanche, les bourgs, hameaux et autres villages sont très nombreux. Aux alentours de presque toutes les communautés humaines se trouve un charnier, une sorte d'immense cimetière clos où les morts sont laissés à pourrir au milieu de pyramides de crânes et autres montagnes d'ossements.

La mer est présente aussi, bien sûr. En fait, elle cerne complètement cette "Bretagne", qui est une île immense. Les plages sont jonchées d'épaves et de cadavres de noyés plus ou moins grignotés par les crabes. L'océan ne s'étend pas très loin - au bout d'une ou deux heures de navigation, le courant ramène votre embarcation a la côte, ou la fait chavirer. Les rares personnes assez courageuses pour s'aventurer au-delà de cette limite ont sombré dans les limbes.

 

CITADELLE
Aucune. L'Ankou aime trop ses terres pour s'isoler dans un palais. Il préfère sillonner son domaine, avec sa charrette et nos deux valet (un cadavre gonflé de gaz et un autre presque momifié). Comme, de toute façon, il peut se transporter instantanément d'un lieu à l'autre ou modifier le paysage, simplement en le voulant, il estime qu'une résidence pompeuse ne lui servirait à rien.

Il existe quand même un site d'importance dans le Royaume celui de la 'banque de corps", ou l'Ankou conserve une trentaine de simulacres plongés dans le coma. Il y en a pour tous les goûts, de la jeune fille fraîche et souriante au cadavre horriblement putréfié en passant par le vieillard blafard qui est son déguisement favori. Ils gisent sur des dalles, dans un cimetière anonyme. Ils sont exacte-ment semblables aux dizaines de cadavres qui les entourent.

Une remarque importante en passant : l'Ankou est tout à fait capable de se glisser dans des corps morts et de les animer temporairement. Aucun autre Selenim (à part peut-être ceux d'Haïti) n'y est jamais parvenu. Cela signifie que même la destruction des corps qu'il conserve dans son Royaume le gênerait, sans l'empêcher de sortir dans le monde réel.

 

SOUVERAIN
L'Ankou est avant tout un esthète et un philosophe. Depuis plus de mille ans, son principal souci est la mort des humains, et ce qui les attend après... Il a poussé la nécromancie à un point difficilement imaginable, développant des douzaines de nouveaux sorts. Il en sait sans doute très long sur ce que devient la force vitale des humains après sa soi-disant " dissipation ".

Aux yeux des habitants ordinaires de la Bretagne, c'est un monstre cruel, qui apporte la mort selon son caprice. Il n'en est rien, Il a pitié d'eux. S'il tient tant a prendre en charge le trépas de ses sujets, c'est " pour leur éviter le pire". De quoi s'agit-il ? Il n'a jamais jugé bon de le dire à qui que ce soit. Il est possible que le royaume de la Mort soit, lui aussi, peuplé de prédateurs...

Il a été très actif jusqu'au XVIIIe siècle. On le voyait encore beaucoup dans les années 1800, même si c'est à cette époque qu'il a commencé a éviter les villes. En revanche, depuis 1920 environ, il limite ses apparitions dans le monde réel au strict minimum.

Mais cela pourrait changer. Aux dires des rares Selenim qui lui ont rendu visite récemment, il semble las de la semi-retraite dans laquelle il s'est confiné depuis le début du XXème siècle. Ceci dît, le monde des humains n'a plus tellement l'air de l'intéresser non plus. Selon les témoins, cette " fatigue " est interprétée comme le signe d'un dégoût de plus en plus profond pour l'existence (un signe de vieillesse pas si rare chez les immortels, ou comme le prélude à un nouveau changement - peut-être l'amorce d'une " transcendance " - le passage à un nouvel état, à l'image de ce qu'à connu Lilith. Dans les palais de l'Arcane et les Royaumes du culte, les spéculations vont bon train...

 

COUR
Aucune, du moins au sens habituel. Le Royaume se gouverne fort bien tout seul, et l'Ankou n'apprécie guère les parasites et les flagorneurs. En revanche, il ne déteste pas la conversation, et reçoit volontiers des visiteurs. Les Selenim de passage sont toujours les bienvenus, s'ils arrivent à pénétrer dans son univers, Il lui arrive aussi de recevoir des humains, Jusqu'au début de ce siècle, il laissait les accès de son Royaume ouverts en permanence, et recevait quantité de voyageurs égarés qui avaient pris le mauvais tournant lors d'une promenade nocturne. Il en a gardé la plupart, et tous ceux qu'il a remis sur le bon chemin sont morts peu après...

A trois reprises au cours de ces dix dernières années, il s'est dérangé en personne pour enlever un individu qu'il jugeait particulièrement intéressant. Il a permis à ces "invités" de passer quelques semaines dans son Royaume avant de les renvoyer à la surface, libres et en bonne santé. Ce douteux honneur est échu à un curé de Basse Bretagne, à une ethnologue de l'université de Rennes et à un obscur poète de l'arrière-pays brestois (qui a très mal supporté le choc, et dont l'internement n'est plus qu'une question de semaines). Tous trois disposent maintenant d'informations de première main sur toutes sortes de questions occultes, et cela s'est su. Sans le vouloir, l'Ankou en a fait des cibles pour tout ce que la France compte de sociétés secrètes, Templiers, Mystères et autres groupes plus ou moins nébuleux.

Ceci dit, dans la mesure où il les protège (d'assez loin, et par effets-dragons interposés), ses "élus" n'ont pas encore rencontré de problèmes trop graves.

Par ailleurs, il est connu pour être à l'écoute de son cheptel. Les humains assez fous pour désirer une audience avec lui n'ont qu'à murmurer son nom au plus noir d'une nuit sans lune. Il les entendra et viendra leur rendre visite au crépuscule suivant. Survivre à la discussion risque de ne pas être une mince affaire...

 

SERVITEURS
Dans beaucoup de paroisses bretonnes, on était persuadé que le premier mort de l'année devenait un Ankou - en gros, un adjoint du véritable Ankou, chargé de veiller à ce que le village fournisse bien sa quote-part d'âmes. Cela n'a pas toujours été vrai, et pas partout, mais transformer un malheureux défunt en Sans Repos (en le maintenant ou non dans son corps) et l'obliger à tuer un certain nombre de ses anciens amis est exactement le genre de tour dont l'Ankou est capable. Bien entendu, cela veut dire ranimer un mort, l'entretenir de telle manière qu'il dure au moins un an, lui donner un minimum de pouvoir et peut-être lui apprendre un peu de magie. Bref, c'est une entreprise colossale pour un Selenim ordinaire. L'Ankou en a fait une opération routi-nière et dispose en permanence de plusieurs centaines de créatures de ce type. C'est une bonne indication de sa puissance.

On ne sait pas au juste comment, mais il est possible que ces Sans Repos soit également responsables de la collecte des émotions qui maintiennent le Royaume en vie. Il est certain que l'Ankou et son univers se repaissent de chagrin et de la sensation de perte que l'on éprouve après avoir perdu un proche. En revanche, il n'est pas du tout certain que cette ponction soit opérée sur les vivants...

Quant aux rumeurs qui parlent d'une sorte de culte qui lui serait rendu par une partie des membres de certaines professions en rapport avec la mort (entrepreneurs de pompes funèbres, gardiens de cimetières, pharmaciens, médecins, etc.)... eh bien, rien n'a jamais été prouvé. N'empêche, si j'étais vous, j'éviterai de mourir en Bretagne. On ne sait jamais.

 

HABITANTS
Essentiellement des âmes humaines. Des milliers et des centaines de millier d'âmes, venues de toutes les époques. Officiellement, pour ses pairs Selenim, ce sont des effets-dragons animés par sa seule volonté, et façonnés à l'image d'humains de base, mais autant le répéter ce sont des âmes. Intactes, à ce qu'il semble. Autrement dit, l'Ankou dispose d'un moyen de détourner le Ka-Soleil humain, et de le forcer à séjourner dans son Royaume, au milieu d'une fantastique concentration de Lune Noire, sans l'endommager.

Il semble que les conditions de vie de ces hôtes soient largement déterminées par les illusions qu'ils entretenaient sur la mort et leur destin dans l'Au-delà. Presque tous sont condamnés à rester pour quelques siècles subjectifs sous la forme d'un arbre ou d'un caillou, à porter de lourdes charges tant qu'un cœur pur ne les aura pas aidé, et ainsi de suite.

Bref, pour un observateur superficiel, ils endurent un horrible châtiment. Avec certains autres Selenim, cela n'aurait pas grand-chose d'étonnant, mais l'Ankou n'a rien d'un tortionnaire sadique.

Alors ? Il existe une hypothèse qui rend compte de tous les faits. Ceci dit, elle n'est étayée par aucune preuve. Supposons que l'Ankou se soit attribué un rôle de " filtre". Il aurait créé son petit purgatoire privé pour y faire vivre les âmes de certains humains, dans l'espoir de les libérer de... quoi, au juste ? La plupart de ses sujets, issus d'une culture catholique, parleraient sans doute de leurs " péchés ". Après tout, pourquoi pas ? Et une fois l'âme " purifiée " (même si cela prend des centaines d'années), l'Ankou la libérerait pour l'envoyer... où ? Au Paradis? Dans le Néant ? Vers une nouvelle incarnation ? En supposant qu'il le sache lui-même, il y a peu de chance qu'il le dise un jour...

Bien entendu, il existe aussi des créatures de Lune Noire, plus ou moins indépendantes. Presque toutes ont une peur bleue du "maître" et lui servent plus ou moins volontiers de messagers ou d'espion (c'est notamment le cas des corbeaux et des chiens, qui vont même parfois jusqu'à se risquer dans le monde réel).

Affaires courantes : rien de particulier. Il est probable qu'au cours de ces derniers siècles, l'Ankou ait accumulé une quantité de Lune Noire absolument fantastique. Il est possible qu'il l'utilise dans ses opérations avec les humains... mais il se peut aussi qu'il en garde une importante réserve pour remodeler son Royaume, ou créer des effets-dragon au cas où la situation dans le monde réel deviendrait totalement incontrôlable.

Position dans le conflit culte/Arcane strictement neutre, L'Ankou se considère comme très au-dessus de ces futilités.

 

EVOLUTION FUTURE
Elle dépend largement des résultats de la campagne le souffle du dragon. Le maintien du statu quo ne le dérangerait guère. L'échec des PJ l'obligerait à compter avec une nouvelle puissance violente, probablement hostile, mais incapable de lui faire du mal (en revanche, elle ne se gênera pas pour en faire aux humains, ce qui pourrait le contrarier). Enfin, un succès des Nephilim amènerait tant de changements, et à si long terme, qu'il est difficile de spéculer sur sa réaction...


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